Comment ceux qui prétendent défendre le Savoir, y compris J-M Blanquer, détruisent l'école républicaine (ouvrage)
Paru dans Scolaire le mardi 01 février 2022.
C'est une “oeuvre d'historien“, comme le dit lui-même Claude lelièvre dans son dernier ouvrage, qui met en garde d'emblée : “La démocratie est en danger. Nous en sommes là.“
L'historien y explique notamment que “ce sont souvent les mêmes qui se plaignent de la baisse du niveau, font l'apologie du savoir et de l'instruction, et qui véhiculent de telles ignorances et de tels contresens, se jouant cyniquement de la vérité". Il a pour objectif de prendre le “contrepied des nombreuses représentations fantasmées du passé qui ont envahi l'espace public“.
Sous-titré en effet “une dérive réactionnaire“, le livre étrille l'utilisation fallacieuse des termes “République“ et “républicain“ par le ministre de l'Education nationale lui-même, cevqu'il qualifie de “pratique politicienne très déterminée dans la falsification, la dramatisation et l'intimidation“.
De par ces “appellations d'origine non-contrôlées“, s'opère un glissement, se transpose pour l'auteur une opposition “dramatique entre républicains et pédagogues qui a été montée avec beaucoup d'artifice en France ces quarante dernières années“ qui “n'a aucun fondement historique, bien au contraire.“
“Les grands fondateurs de l'école de la 3ème République (Jules Ferry et Ferdinand Buisson), rappelle-t-il, se sont prononcés sans ambages en faveur de la liberté pédagogique pour les enseignants, et cela contrairement à leurs prédécesseurs royalistes ou impériaux.“ Ils ont d'ailleurs pris très au sérieux la réflexion pédagogique les pédagogues, la pédagogie, cette dernière n'étant ainsi “pas un gros mot“.
En outre, Claude Lelièvre démontre, discours de Jules Ferry (au congrès pédagogique des instituteurs de France en 1881) à l'appui, que “contrairement à ce que certains anônnent avec obstination et répètent à l'envi, sous-entendant que ces fondamentaux sont négligés, le lire-écrire-compter que certains imaginent être le mantra de l'école républicaine ne l'a jamais été.“ Et si le lire-écrire-compter arrive après l'instruction morale dans les trois grandes lois qui ont structuré l'enseignement primaire, chez Jean-Michel Blanquer “on assiste à une inversion de l'ordre des priorités et une réduction de l'instruction morale et civique au seul ‘respect‘“.
“Des tentatives pour renforcer le pouvoir des directeurs d'école, ajoute l'historien, se sont succédé tout au long de ces cinquantes dernières années, et précipitées lors du quinquennat actuel. Elles ne sont pas du tout dans le prolongement historique des dirigeants républicains au pouvoir, bien au contraire.“
Enfin, il considère que la politique de dédoublement des classes de CP (puis de CE1) dans les REP a bien été annoncée et menée, même si elle a été réalisée au détriment d'autres encadrements ou types d'encadrement, mais on ne sait pas "de façon précise et officielle si elle a donné effectivement des résultats, lesquels et dans quelle mesure quatre années après son lancement.“
A noter l'analyse de “la longue marche à bas bruit des filles“ pour l'égalité d'éducation, de leurs origines à l'aboutissement de la mixité scolaire, dont les inégalités demeurent à travers les représentations de stéréotypes de genre (dans les manuels scolaires).
Claude Lelièvre, L'école Républicaine ou l'histoire manipulée, éditions du bord de l'eau, 142p, 12 €.