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Elèves en situation de handicap : la scolarisation n'est pas toujours la meilleure solution (délégation aux droits des enfants, Assemblée nationale)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le dimanche 19 novembre 2023.

Il faut '"ouvrir l’école au soin" estiment les députés Servane Hugues (Renaissance) et Alexandre Portier (LR), auteurs du "Rapport d'information sur l’instruction des enfants en situation de handicap" qui vient d'être publié par la délégation aux droits des enfants. Les co-rapporteurs constatent en effet que l’éducatif et le soin "se côtoient", mais que "les réticences de la communauté éducative et des IME à un rapprochement sont vives : Les syndicats d’enseignants, lors de leur audition, ont réaffirmé que l’école n’était pas un lieu de soin." Les deux élus considèrent donc que "le principal défi de l’école inclusive" est justement de rapprocher "deux univers et deux logiques, l’éducatif et le soin".

Ils dressent un panorama de la situation. En ce qui concerne la scolarisation en milieu ordinaire, elle concernait l'année dernière 222 500 élèves dans le premier degré et 213 500 dans le second degré, mais ces chiffres ne donnent aucune indication sur le nombre d’heures effectives de scolarisation. Selon l’UNAPEI, 25 % des enfants qu'elle accompagne "n’ont aucune heure de scolarisation, 28 % suivent une scolarité entre 0 et 6 heures par semaine, 22 % entre 6 heures et 12 heures par semaine et 27 % bénéficient de plus de 12 heures sur la semaine". Les auteurs ajoutent qu'en 2021, "selon le ministère de l’Éducation nationale, 11 000 enfants étaient en attente d’une place en instituts médico-éducatifs", selon l'INSEI (Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’école inclusive) "environ 50 000 enfants ne seraient pas scolarisés".  Selon la DREES, "sept enfants sur dix ayant un polyhandicap ne sont pas scolarisés".

Les auteurs soulignent que "lors de leur audition, les syndicats d’enseignants ont tous insisté sur la nécessité de ne pas médicaliser la difficulté scolaire", que "certaines situations relèvent plus de l’échec scolaire que du handicap" et ils regrettent "le démantèlement des équipes de réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED)". Le constat est d'ailleurs "unanime, les enseignants ne sont pas suffisamment formés pour l’accueil d’un, voire de plusieurs enfants en situation de handicap", ils sont "censés bénéficier d’un module de formation obligatoire de 25 heures" dans les INSPE, mais "ces heures ne sont pas toujours dispensées".

Les co-rapporteurs soulignent aussi que "le modèle français a choisi de conserver des dispositifs médico-sociaux très diversifiés, en fonction du handicap" et que "les dispositifs restent illisibles pour les parents" d'autant que "le parcours pour obtenir la reconnaissance du handicap (...) s’apparente à un parcours semé d’embûches, tant les démarches sont complexes et longues (...). Dans les milieux défavorisés, les travailleurs sociaux sont censés orienter les familles vers les dispositifs et les informer de leurs droits. Or (...) cette profession n’est pas sensibilisée à cette question et ne connaît pas toujours les droits et dispositifs proposés aux enfants en situation de handicap."

Autre difficulté, les notifications sont accordées en cours d’année scolaire : "Ce n’est pas sans poser des difficultés aux équipes enseignantes qui doivent, en cours d’année, accueillir un élève supplémentaire ou au PIAL qui doit affecter un AESH." De plus, "la mise en place des PIAL, dans une logique d’optimisation des ressources, se révèle désastreuse pour certains élèves", quand les AESH doivent "s’occuper de 7 à 8 élèves". Un enfant en situation de handicap peut d'ailleurs "être accompagné par plusieurs AESH différents selon les matières et en changer tous les mois".

Les auteurs mettent aussi l'accent sur le risque de harcèlement : La proportion d’élèves en situation de handicap harcelés est de 35 % contre 14 % pour les autres enfants. L'instruction en famille pourrait être un recours, mais " les dossiers d’autorisation pour une IEF sont complexes et doivent être renouvelés tous les ans (...), certaines académies refusent l’IEF quand les enfants n’ont pas de notification MDPH ; la scolarisation auprès du Centre national d’enseignement à distance (CNED) adapté s’arrête à 16 ans (...), les contrôles menés par les inspecteurs sont très variables d’une académie à l’autre et peuvent être inadaptés aux profils des enfants. Certains inspecteurs nieraient les pathologies."

Au-delà, les auteurs se demandent si la scolarisation en milieu ordinaire est toujours la meilleure solution pour l'enfant. Il peut préférer "retrouver ses camarades qui présent(ent) les mêmes difficultés" plutôt que d'être "soumis à la pression du programme scolaire" dont "la rigidité ne correspond pas aux difficultés" qu'il rencontre. C'est cette pression qui expliquerait que le secteur privé lucratif se développe.

"La logique du tout ou rien" est-elle pertinente ? "Le 'tout école' ou le 'tout établissement' est contre-productif (...). Il faut pouvoir faire des allers-retours entre des classes ordinaires et des univers plus confinés offrant des instants de repli (...). Ces enfants ont besoin de temps dans des établissements spécialisés (...). C’est ainsi que le dispositif ITEP se révèle un levier pour favoriser l’inclusion, en permettant ces allers-retours."

Les rapporteurs plaident "pour un recrutement massif de professionnels de santé et notamment des infirmiers et des psychologues scolaires", et ils font 35 recommandations dont celles-ci : "Préciser les conditions et la qualité de la scolarisation (volume horaire en particulier) dans les statistiques officielles recensant le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en classe ordinaire", "Rappeler le caractère obligatoire de la première rencontre entre l’AESH et les parents de l’enfant accompagné", "Garantir dans l’intérêt des enfants la stabilité des AESH affectés au cours de l’année", "Sensibiliser les enseignants aux formations et ressources de l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l'éducation inclusive (INSEI)", "Mettre en place des modules d’apprentissage (lecture, écriture, calcul, autonomie) qui seraient validés en fonction des progrès des enfants, pour se défaire de la logique de performance et de passage de cycles et niveaux", "Favoriser les passerelles entre l’école ordinaire et l’établissement médico-social, pour que l’enfant puisse changer d’environnement selon ses besoins".

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