Les "zonards" forment une société complexe, une thèse de Tristana Pimor publiées aux PUF
Paru dans Culture le lundi 29 septembre 2014.
"C'est vrai que des fois quand t’as dix chiens, qu’les chiens qu’aboyent et tout, y a certaines personnes qu’ont peur. Mais on est pas méchants, on va pas leur sauter d’ssus. Mais quand t’es tout seul, les gens t’regardent plus." Cette déclaration d'un "zonard" est extraite d’une "ethnographie de l'intérieur de la vie zonarde" proposée par Tristana Pimor qui vient de publier aux PUF sa thèse de doctorat menée sous la direction d'Eric Debarbieux.
L'auteure, après son immersion dans la vie d'un squatt, a souhaité établir "une sociologie complexe de la déviance" avec des nouvelles approches. Elle se démarque du concept de "jeunes en errance" issu des travaux de l'INED et que l’institution a repérés à partir des seuls échec scolaire, du manque de diplôme, de différents familiaux ou encore de la transformation du marché de l'emploi devenu moins clément. "Les données de mon enquête récusent en partie certains aspects de ces analyses puisque tous n'ont pas été en échec scolaire ou n'ont pas connu de difficultés familiales", prévient-elle.
Restent pour elle à examiner "les logiques éthiques et rationnelles qui guident les individus", pour lesquels elle a repéré quatre manières d'être zonard, les "satellites", les "zonards intermittents", les "zonards experts" et les "travellers". A ces quatre types de "carrière" dans la zone correspondent des modes de socialisation différents en lien avec "des passés primaires" divergents.
Pour les "satellites" la méritocratie reste efficace, les "intermittents" attribuent leurs galères "à la famille ou aux services sociaux", tandis que les "experts" les imputent à la société toute entière et développent leur "capital délinquant". Les "travellers" au contraire recherchent un épanouissement personnel et un idéal. L'un d'eux le résume ainsi : "tous les matins j’ouvrirai la porte, les chiens iz’auront un jardin énorme, où on sera posés..."
"Zonards, une famille de rue", (Prix Le Monde de la recherche universitaire) de Tristana Pimor, Partage du savoir, PUF, 236 p., 22 euros.