Un plaidoyer pour "une école ouverte" et "une éducation à la confiance" (A. Jellab)
Paru dans Scolaire le mardi 14 septembre 2021.
A quelles conditions l'école peut-elle être "une institution émancipatrice" ? Aziz Jellab, sociologue et inspecteur général, considère que la crise sanitaire a joué un rôle de "miroir grossissant" en même temps que d'un électrochoc pour le système scolaire. Elle a révélé les potentialités d' "une institution capable d'assurer sa mission dans la durée", ce qu'il met en avant car "l'optimisme doit rester l'allié objectif de tout projet éducatif", non sans souligner qu'elle doit "désormais aller plus loin dans un monde en mutation qui exige davantage de lucidité et d'esprit critique".
Puisqu'elle ne peut "rester enfermée dans une vision passéiste" qui l'identifie "à un espace séparé du monde", l'école doit être "ouverte sur son temps". Elle est à la fois "cadre de vie" et "lieu d'apprentissage". Cette dualité, l'auteur y revient à plusieurs reprises. Pour lui, "une éducation à la confiance, au faire et à l'apprendre-ensemble, qui favorisent chez les élèves le développement de compétences telles que l'empathie, l'esprit de solidarité, la prise d'initiative, n'a de sens qu'arrimé à des activités et des savoirs scolaires".
C'est cette conjugaison du pédagogique et du disciplinaire qui permettra à l'école d'être "davantage instituante". Elle "ne prépare pas seulement "à la vie sociale et professionnnelle", elle est "constitutive de la vie quotidienne", ne serait-ce que par ses effets sur les parents d'élèves, comme l'épreuve du confinement l'a montré. Elle a aussi un rôle à jouer en termes d'éducation à la santé, un domaine "indissociable du climat scolaire" et de "l'éducation à l'esprit critique, à la culture scientifique, à la réflexion sur la solidarité et le partage avec autrui". Aziz Jellab plaide pour la construction chez les élèves d'un "rapport confiant aux savoirs".
Cela passe par "un réel changement des pratiques pédagogiques ordinaires", par "une réflexion collective" sur le travail personnel qui est demandé à l'élève, et qui implique les enseignants mais aussi les CPE, les AED, et des acteurs hors l'école, puisqu'il faut "repenser les collectifs professionnels" et promouvoir un "style éducatif 'souple' ou 'démocratique', celui qui offre à l'enfant la possibilité de dire son point de vue, de l'argumenter, de comprendre les règles et les contraintes", car c'est "celui qui est le plus approprié pour un développement intellectuel et affectif épanoui".
"L'Ecole à l'épreuve des incertitudes, plaidoyer pour une institution émancipatrice", Aziz Jellab, éditions Bergeer-Levrault, 210 p., 19€