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URGENT : Le SGEN et la FEP-CFDT appellent à la grève (interview exclusive)

Paru dans Scolaire le dimanche 09 janvier 2022.

Le SGEN-CFDT a décidé aujourd’hui, après réunion de tous ses syndicats, d'appeler à la grève le 13 janvier. C'est donc l'ensemble des fédérations de l'enseignement public qui appelle à la grève, ainsi que trois des organisations de l'enseignement privé. Entretien avec Catherine Nave-Bekhti, sa secrétaire générale.

Catherine Nave-Bekhti : C'est effectivement une décision collective qui a été difficile à prendre dans un climat d'exaspération croissant. Nous avions d'ailleurs souscrit à la déclaration unanime de tous les syndicats, mercredi lors de la réunion en visio avec le ministre, pour lui dire qu'il était inacceptable d'apprendre, une fois de plus par une déclaration à la presse les mesures qui seraient prises. Mais, mercredi (le 5 janvier, ndlr), la majorité de nos syndicats académiques ne souhaitait pas une grève nationale, partout en même temps, qui ajouterait de la désorganisation à la situation très difficile que connaît l'ensemble de la société. De plus, au SGEN-CFDT, nous avons toujours considéré que la grève n’est pas le seul moyen d’action syndicale pour obtenir satisfaction, d'autant que les discussions avec le ministère n'étaient pas terminées et que nous attendions les réponses à nos interpellations. D'ailleurs certaines de nos revendications, qui figuraient dans le texte de notre alerte sociale de décembre (voir ToutEduc ici) ont abouti, le ministère demandant notamment aux recteurs l'allègement des tâches pour les directeurs et directrices d’école, les personnels de direction, mais aussi pour tous les enseignants, le report des animations pédagogiques et des formations, la possibilité de reporter les évaluations d’établissement, la distribution de masques chirurgicaux... Nos homologues du secteur de la santé de la CFDT ont été abasourdis quand ils ont appris que nous avions des masques tissu.

ToutEduc : Mais vous n'avez pas tout obtenu...

Catherine Nave-Bekhti : Non bien sûr, nous demandions notamment que soient fixées des règles claires pour des fermetures de classe. Avec le nouveau protocole, quand un élève est contaminé, toute la classe doit se faire tester, donc prendre rendez-vous... quand il y a un créneau disponible. Résultat, le lendemain, un enseignant se retrouve avec quatre élèves, tous les autres sont chez eux, mais il ne peut pas les suivre en distanciel puisqu'il doit faire cours pour ceux qui sont là. Dans le second degré, les CPE et les AED passent leur temps à courir après les attestations... Il faudrait qu'il soit bien dit qu'au-delà de tel pourcentage d'absences, la classe, voire l'école ou l'établissement est fermé. Dans le premier degré, la charge de travail est insoutenable pour nombre de directeurs et directrices d’école. Nous proposions d'ailleurs le retour au protocole antérieur, quand un élève est contaminé, la classe ferme. Le "ouvert à tout prix" n'a aucun sens. Le sentiment d'absurdité est tel que les risques psycho-sociaux sont aujourd'hui supérieurs au risque épidémique.

ToutEduc : Quelle analyse faites-vous de la situation ?

Catherine Nave-Bekhti : J'ai évoqué des exigences à court-terme, mais il faut voir plus loin. Depuis deux ans maintenant, on peut parler d'une discontinuité majeure dans les apprentissages pour nos élèves, et les aménagements de programmes ou dans les évaluations ne sont pas du tout à la hauteur des difficultés qu'ils rencontrent. Et au-delà, nous demandons que soient élaborés des scénarios pour toutes les évolutions possibles de la pandémie, ou pour d'autres crises sanitaires, y compris les pires des hypothèses. Quand, au mois de janvier 2021, nous avons demandé au ministère d'envisager une année entière sous covid, nous étions bien seuls, et le ministère n’a pas travaillé alors dans cette direction !

ToutEduc : Dans ces conditions, pourquoi aviez-vous choisi, mercredi, de ne pas faire grève ?

Catherine Nave-Bekhti : Notamment parce qu'une partie de nos revendications, qui figuraient dans notre alerte sociale ont abouti sans que nous fassions grève, et parce que, sur le terrain, nos camarades voulaient pouvoir mener des actions fortes, y compris la grève, en fonction du contexte local, et qui n'auraient pas été entendues dans le contexte d'une grève nationale. Par exemple, certains DASEN, malgré une consigne nationale, maintiennent l'obligation pour les enseignants d'assurer dans le 1er degré les APC (activités pédagogiques complémentaires), certains recteurs refusent d'alléger les tâches des personnels de direction ou des enseignants. Nos collègues voulaient aussi pouvoir souligner spécifiquement le refus de certaines collectivités d'équiper les écoles ou établissements en capteurs de CO2, et nous ferons remonter au ministère... C'est pourquoi nous avions décidé de maintenir notre préavis de grève, de façon à couvrir toutes les actions locales.

ToutEduc : Qu'est-ce qui a changé depuis mercredi ?

Catherine Nave-Bekhti : Les choses se sont accélérées et la majorité de nos syndicats académiques après des débats internes est à présent favorable à la grève, la désorganisation du système éducatif est à présent telle que la grève ne l'aggravera pas. De plus, l'exaspération que provoque la communication du ministre a encore monté d'un cran, il ne reconnaît pas l'ampleur des difficultés auxquelles sont confrontés les personnels.

Propos recueillis par P. Bouchard, relus par C. Nave-Bekhti

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