Présidentielle : le programme de M. Le Pen analysé par Claude Lelièvre (Le Monde)
Paru dans Scolaire le jeudi 14 avril 2022.
"Au rebours d'une 'restauration' du projet de l'école républicaine, le programme de Marine Le Pen s'apparente à une falsification historique", estime Claude Lelièvre dans une tribune publiée par Le Monde daté de ce 14 avril. L'historien et philosophe considère que le candidate du "Rassemblement national" qui prétend "restaurer" le système éducatif pour revenir à l'avant "mai 68", fait erreur. Elle oublie que c'est le ministre de De Gaulle, Alain Peyrefitte, qui, dès le mois de février 68, demandait une évolution des méthodes pédagogiques, au service de la démocratisation de l'enseignement secondaire. Pour l'auteur, ce qu'elle souhaite n'a rien à voir avec le retour à un passé qui aurait existé, mais plutôt avec une "révolution nationale".
Elle se propose en effet de confier au Parlement, donc au politique, l'essentiel des programmes qui seraient mis "au service d'une ambition nationale", de la promotion d'une école conçue comme "vecteur de transmission de l'histoire de France et de son patrimoine". Dans ces conditions, "les enseignants devront être les fidèles exécutants de programmes qui auront été définis foncièrement par le Parlement" et ils devront avoir pour outils des manuels labellisés par le ministère. Jules Ferry en 1881 refusait pourtant "toute idée de manuel officiel" et préconisait que le choix soit effectué "collectivement par les enseignants eux-mêmes", la délibération étant "l'un des moyens les plus efficaces pour former l'esprit pédagogique de nos maîtres". La candidate à l'inverse prévoit de transformer les enseignants "en simples exécutants", estime encore C. Lelièvre, puisqu'elle promet un "accroissement du pouvoir de contrôle des corps d'inspection" et de vérification de la "neutralité absolue" des enseignants et, pour les inspecteurs, "une obligation de signalement des cas problématiques". L'historien conclut : "Cette mise sous tutelle directement politique des enseignements serait sans précédent, et cette mise sous surveillance fort inquiétante."