Enseignement à distance : la Cour des comptes demande au CNED de clarifier son rôle
Paru dans Scolaire le mardi 27 septembre 2022.
"Le développement de la correction automatique emportera des conséquences sur l’évolution des effectifs d’enseignants" du CNED, estime la Cour des comptes qui a examiné les comptes et la gestion du Centre national d’enseignement à distance (CNED, pour les exercices 2013 à 2021 et qui publie un référé auquel le ministre n'a pas répondu "à ce stade". Une bonne part de ce jugement est consacrée aux enseignants qui pourraient se voir confier d'autres missions et dont la productivité "nourrit des interrogations".
La Cour souligne d'ailleurs que "le CNED ne maîtrise pas l’ensemble des ressources humaines (2 030 équivalents temps plein [ETP]) qu’il emploie", puisque "plus de la moitié de ses effectifs sont constitués d’enseignants (1 109 ETP) rémunérés par les rectorats et mis à disposition de l’établissement". Ces personnels ne sont en effet plus "en capacité d'assurer la plénitude (de leurs) fonctions". Mais alors que 65 % des personnels affectés dans ce cadre au CNED bénéficient de la reconnaissance de travailleur handicapé, comme ils ne sont pas des personnels du CNED, celui-ci est "paradoxalement", "débiteur du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP)". Les magistrats notent encore que "le rôle d’accueil des enseignants en difficulté (...) limite sa capacité (du CNED) à recruter ses personnels sur le seul critère de leurs compétences", tandis que le suivi de ces personnels "est trop souvent insuffisant pour permettre d’envisager de véritables reconversions".
Un objectif social sans base légale
Second thème envisagé par la Cour, la politique de tarification : "La scolarité à distance destinée aux élèves empêchés" est gratuite jusqu’à 16 ans, mais payante au-delà (320 € en 2021) alors qu'avec la loi "pour une école de la confiance", la "formation est obligatoire pour tout jeune jusqu’à l’âge de sa majorité". La question de la tarification se pose aussi pour les "formations tout au long de la vie", permettant des reprises d’études. La Cour encourage le CNED à poursuivre dans cette voie mais constate que cette offre de formation à destination de publics socialement plus fragiles "conduit à rendre de nombreux tarifs de formation inférieurs à ceux de ses concurrents (...). Cet objectif social n’a jamais été discuté explicitement avec la tutelle et ne s ’appuie sur aucune base légale spécifique". En ce qui concerne "la préparation des concours administratifs, en particulier ceux de l’enseignement, pour lesquels l’offre privée est faible, voire inexistante" et qui est souvent déficitaire, "une remise en ordre financière s’impose" et les conditions de leur financement par le ministère doivent être définies.
La Cour s'interroge aussi sur "l'école d’ingénierie de la formation à distance" (formation de formateurs, ndlr) qui "propose à un large public de professionnels (...) des formations sur catalogue", ce qui "pose la question de zones de recoupement avec les nouvelles missions du Réseau Canopé, chargé de mettre en place l’e-Inspé destiné à la formation continue des enseignants, notamment dans le domaine numérique".
Réduire le nombre de sites
Elle s'inquiète également "de l’insuffisante interopérabilité entre les systèmes d’information du CNED et les applications ministérielles (...). L’absence d’identification des élèves du CNED dans les bases ministérielles rend impossibles les études statistiques sur leur taux de réussite aux examens et empêche l’établissement d’appréhender les résultats de ses formations." Le CNED doit d'ailleurs repenser sa place dans le système scolaire du fait de l'extension de ses missions : "La crise sanitaire de 2020 a conduit à un changement d’échelle en matière de services rendus par le CNED à l’enseignement scolaire (...). Son dispositif 'Ma classe à la maison' et les classes virtuelles ont permis (aux élèves) de poursuivre leur apprentissage et conserver un lien avec leurs professeurs". Il doit donc "clarifier" sa place au sein de l’Education nationale.
Enfin la Cour fait quelques remarques sur les finances du CNED qui est implanté sur 8 sites, outre le siège à Chasseneuil du Poitou. "Cette multiplication des sites (...) n’est plus justifiée à l’heure du numérique" et "une réduction significative du nombre de sites s’impose".
Le référé ici