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L'impact spectaculaire du Service militaire volontaire sur l'emploi (Cereq)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le vendredi 16 décembre 2022.

Le Service militaire volontaire a “un impact de 30 points sur les taux d’emploi des jeunes bénéficiaires à la sortie du dispositif, et de 25 points six mois plus tard“, constate le CEREQ dans le dernier numéro de la revue Formation emploi.

A efficacité, effectif réduit

Cette efficacité, Denis Anne et Yannick L'Horty la détaillent dans leur “anatomie“ des spécificités de ce programme de formation, qui fut lancé en 2015 (sur le modèle du service militaire adapté qui existe en Outre-Mer, ndlr) puis pérennisé dès janvier 2019, en rapport aux autres dispositifs (écoles de la deuxième chance, établissements pour l’insertion dans l’emploi, etc..) qui ciblent les jeunes décrocheurs.

Aujourd'hui, ce sont six centres qui accueillent plus de 1 000 jeunes volontaires chaque année, mais les auteurs précisent tout de même que “la couverture territoriale est partielle, avec plusieurs grandes régions dépourvues de centres“. Ils ajoutent d'ailleurs qu'après avoir bénéficié d’une forte attractivité lors des premières années d’expérimentation en 2015 et 2016, le SMV “a été confronté à des difficultés croissantes de recrutement, en particulier pour les centres d’Île-de-France et du Grand Est“, avec pour résultat “une faible sélection des jeunes candidats“.

“Marginal d’un point de vue quantitatif“, la différence de taille du point de vue des effectifs de jeunes accompagnés du SMV est de 1 à 100 avec la “garantie jeunes“ (100 000 recrutés) et de 1 à 150 avec le “service civique“ (150 000 recrutés), ce qui “est évidemment un facteur qui pèse négativement sur la notoriété et l’attractivité du dispositif“. Question attractivité justement, le SMV “n’est pas le programme le plus rémunérateur pour les jeunes qui y participent“. Le volontaire est en effet pris en charge pendant toute la durée du SMV (logement, nourriture, habillement) et reçoit une solde de 313 € nets par mois. L'“aide monétaire“ dure théoriquement de six à douze mois mais est en pratique plus souvent versée pendant huit mois.

Recrutement

De plus, par rapport aux autres dispositifs pour lesquels que le gouvernement apporte force communication, comme la “Garantie Jeunes“, concernant le Service militaire volontaire “la hiérarchie des sources d’information“ se trouve inversée. Le CEREQ explique que le premier relais d’information est celui de la famille et des amis, et que les professionnels de l’insertion ne sont des sources d’information que pour un jeune sur quatre. D'où une connaissance de son existence par des “sources locales“ et “très proches du terrain“, tels que les affichages en mairie, la distribution de flyers dans les zones urbaines, la présence et la représentation du SMV lors d’évènements sportifs, la distribution de dépliants en boîte aux lettres, le flocage des véhicules, etc..

Intensité

Autre point particulièrement prégnant pour ce dispositif, son intensité. Est décrit un programme “long“, le plus souvent entre six et huit mois mais pouvant aller jusqu’à douze mois et qui nécessite des efforts de la part des “stagiaires de la formation professionnelle“. Soumis au régime de l’internat, ils portent des tenues militaires et sont tenus de respecter une discipline stricte. Le SMV est le seul programme de formation de droit commun qui soit entièrement géré par l’armée, dans une logique interarmées, apprend-on encore. La militarité est un point central “qui le distingue de tous les autres programmes et ajoute à son intensité (avec la pratique intensive du sport)“.

Ce n'est peut être pas un hasard si est noté, malgré une légère tendance à la baisse dans le temps, une sur-représentation des garçons au sein des effectifs du SMV, qui étaient 72,4 % en 2019-20. Les sociologues expliquent ainsi que la “militarité“ est “une caractéristique forte du SMV qui peut constituer un élément d’attractivité ou de rejet pour les jeunes qui constituent la cible de ce programme et qui explique peut-être en partie la faible proportion de jeunes filles parmi les volontaires“.

S’agissant du niveau de diplôme, on observe davantage d’écarts entre les différentes cohortes suivies depuis 2017. Dans les deux premières, les non-diplômés constituaient “la classe modale“, tandis que les jeunes de niveau bac et plus étaient minoritaires. Dans la dernière cohorte étudiée (2019-20), le profil des parts de jeunes n’est plus régulièrement décroissant avec le niveau de diplôme. Ainsi les très peu diplômés représentent désormais 50 % des volontaires (- 10 points) et le nombre de diplômés est supérieur, tant pour les diplômes techniques inférieurs au baccalauréat (CAP et BEP essentiellement) que pour le baccalauréat et au-delà.

Beaucoup de données sont en revanche assez stable sur la durée. Le SMV se compose en forte proportion de jeunes tout justes majeurs, plutôt en bonne santé et avec, selon leurs déclarations, une estime de soi “moyenne ou faible“. Plus des deux tiers d'entre eux sont des NEETs, en situation d’inactivité ou en recherche d’emploi. Les obstacles qu’ils rencontrent pour trouver un emploi sont pour 58 % d'entre eux des problèmes de mobilité, loin devant le manque d’offres d’emploi dans leur secteur ou leur région (29 %).

Mobilité

Le permis de conduire est dès lors la première motivation à leur candidature, à égalité avec le fait d’acquérir une formation et légèrement devant la vie militaire, indiquent Denis Anne et Yannick L'Horty qui évoquent pour résultat “un effet massif sur l’obtention du permis de conduire“. Les jeunes ont ainsi “des taux de réussite extrêmement élevés“ au passage de l'examen, et voient une augmentation “de plus de 50 points de pourcentage“ dans la probabilité d’avoir le permis de conduire. Ils commentent : “En un temps plus réduit, le SMV s’avère beaucoup plus efficace, ce qui renvoie sans doute à l’intensité de la préparation ainsi qu’à la capacité qu’ont les centres à faire passer eux- mêmes l’examen du Brevet militaire de conduite (transformé en permis de conduire civil à l’issue de la formation).“

Les auteurs évoquent l'éventualité de freins “immatériels“, de barrières à la mobilité qui pourraient être plutôt d'ordre psychologique. En effet, les jeunes interrogés déclarent “ne pas éprouver de difficultés pour se déplacer en ville, que ce soit à bicyclette ou en transports collectifs“ et ils “se sentent à l’aise pour se repérer sur un plan papier, pour plus de la moitié d’entre eux“. De même, ils sont “massivement prêts à déménager, y compris pour une autre région, n’importe où en France et même à l’étranger“ pour trouver un emploi. 

Auto-sélection

Au final, pour les auteurs de cette étude, les jeunes qui arrivent en SMV changent “mais leurs caractéristiques se reproduisent à l’identique“. Ainsi cette permanence dans les données fait que les jeunes qui cumulent les caractéristiques précitées et qui cherchent à la fois une solution à leur problème de mobilité, une formation et une rigueur militaire dans l’accompagnement “s’autosélectionnent pour candidater au SMV“, et, dès lors, “ce programme semble avoir trouvé son public“.

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