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"Tout commence par l’école", une tribune de Benoist Apparu

Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 11 février 2013.

Benoist Apparu, député UMP, a été chef de cabinet de Xavier Darcos lorsque celui-ci était ministre délégué à l'enseignement scolaire. Passionné des questions d'éducation, et se préparant à amender la loi d'orientation pour la refondation (Lire ToutEduc ici), il propose cette tribune aux lecteurs de ToutEduc. 

Tout commence par l’école

B. ApparuNotre système éducatif est l’une de nos grandes fiertés républicaines. Fierté parce qu’il a su élever le niveau moyen de connaissances et de compétences des Français, parce qu’il a su, quelle que soit l’origine sociale et culturelle des parents, permettre à leurs enfants de progresser dans l'ordre social et qu’il a su forger une culture commune. Cette fierté doit aujourd’hui être relativisée. Notre école fonctionne très bien pour les bons élèves, mais notre système régresse dans sa capacité de promotion sociale. Les comparaisons internationales PISA ne révèlent pas un problème global du système éducatif français, mais un problème spécifique et croissant de la difficulté scolaire. Mais plus grave encore, ces faiblesses se concentrent dans les quartiers en difficultés et les CSP les moins favorisées.

Toute politique publique en matière éducative doit se fixer deux objectifs :

1-Elever le niveau de connaissance et de compétences des générations futures.

 Selon l’OCDE, il manque à la France "cent mille têtes chercheuses par an pour qu’elle puisse fonder sa croissance économique sur la recherche et le développement". Un tel objectif n’a rien de rhétorique, mais répond à une nécessité économique et sociale : nous ne pourrons assurer une croissance durable que si nous innovons. J’ajoute que le taux de chômage des jeunes est directement corrélé au niveau de diplôme. Si un jeune sur cinq est au chômage, le ratio monte à un sur deux pour les jeunes sans diplôme ou les jeunes diplômés du brevet. Lutter contre le chômage des jeunes, c’est avant tout élever leur niveau de qualification.

Ce point de départ étant accepté, il convient d’en tirer les conséquences sur l’architecture du système éducatif. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le système éducatif français est structuré autour des mêmes trois cycles. Le primaire a été pensé pour donner à tous les enfants, d’une France très rurale, un socle de base, lire, écrire, compter. Le secondaire, et plus encore le supérieur, étaient sélectifs et destinés à former une élite sociale.

Nos sociétés contemporaines exigent des savoirs plus nombreux, des compétences plus abouties. Nous ne limitons plus les compétences de base au seul « lire, écrire et compter ». La société exige aujourd’hui pour 100% de ses enfants la maitrise du socle commun de connaissance qui dépasse largement l’horizon du seul primaire.

Demain tout ouvrier, tout employé, tout cadre moyen devra avoir un diplôme qualifiant de haut niveau technique. Le baccalauréat professionnel est un niveau que nous devons exiger comme un minimum. Nous devons considérer que tous les jeunes qui ne poursuivent pas dans l’enseignement supérieur doivent obtenir un baccalauréat professionnel.

Nous devons enfin considérer que les jeunes qui obtiennent un baccalauréat général ou technologique ont tous vocation à poursuivre dans l’enseignement supérieur court ou long. Cela doit nous conduire à réformer le passage du lycée vers le supérieur afin que les bacheliers technologiques trouvent enfin une place en BTS ou en IUT.

Ces nouvelles ambitions doivent se retrouver dans l’architecture de notre système scolaire. Je propose de restructurer tout le système éducatif autour de trois nouveaux cycles :

Le premier cycle correspondrait au socle commun de connaissances et de compétences c'est-à-dire au savoir minimum que la société souhaite pour sa jeunesse. Il serait composé de l’actuel primaire et du collège. Le deuxième cycle, destiné à former les employés et les cadres moyens dont notre société a besoin, comprendrait le lycée et l’enseignement supérieur court (niveau licence). L’enseignement professionnel (sous statut scolaire et apprentissage) trouverait une toute nouvelle dimension et reconnaissance dans ce nouveau cadre. Enfin l’enseignement supérieur long parachèverait cette nouvelle organisation pour les cadres supérieurs, les enseignants et les chercheurs.

2-Réduire les inégalités

La massification de notre système, la persistance d’un chômage de masse et plus encore d’un nombre significatif de nos concitoyens très durablement éloignés de l’emploi, génèrent une hétérogénéité grandissante des élèves, des classes et des établissements. Notre pédagogie est une pédagogie égalitariste mais élitiste. Elitiste car elle est conçue pour des enfants qui sont soutenus à la maison, élitiste car le groupe classe, le mode de travail des enseignants, centré sur les savoirs, s’adressent aux meilleurs enfants. Sans parler de grand soir du système scolaire, c’est d’une profonde mutation dont il a besoin pour réduire les inégalités. Une mutation qui s’appelle l’autonomie des établissements. L’autonomie n’est pas un projet politique, c’est le moyen d’organiser le système scolaire afin qu’il puisse mieux répondre à l’hétérogénéité des territoires et des élèves et réduire ainsi les inégalités. C’est une méthode pour individualiser la prise en charge des élèves et notamment des plus fragiles.

Le contenu de l’autonomie se doit d’être très ambitieux et fortement évalué. L’établissement pourrait gérer le recrutement de l’équipe pédagogique, disposer de 30% de la dotation horaire, des dotations horaires disciplinaires réellement globalisées et annualisées, la gestion du temps de présence des enseignants et des heures d’accompagnent qu’il est proposé de créer, l’autonomie dans la définition de la notion de classe, des marges de manœuvre à définir sur les programmes.

Mais l’autonomie n’est pas suffisante si elle n’a pas pour corollaire indispensable, une refonte profonde de l’acte d’enseigner et donc du métier d’enseignant. La frontière traditionnelle entre enseigner, à la charge des professeurs, et éduquer, à la charge des familles, est trop poreuse pour ne pas générer des modifications profondes de ce métier. La mission et le temps de travail d’un enseignant et son temps de présence dans l'établissement ne peuvent plus être exclusivement organisés autour de la transmission de savoirs centrés sur la ou des matières et autour d’un groupe classe.

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