Numérique : de réelles avancées, mais qui sera le pilote ? demande Enjeux e-médias
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le mardi 11 juin 2013.
"Nous avons le sentiment que ça avance, nous sentons une réelle ambition, mais qui assurera la cohérence entre les divers temps du numérique et de l'éducation formelle et non formelle ?" Christine Menzaghi et Christian Gautellier (Enjeux e-médias), interrogés par ToutEduc, réagissent au "point d'étape de l'entrée de l'École dans l'ère du numérique", hier 10 juin. Les deux responsables de la Ligue de l'enseignement et des CEMEA se réjouissent notamment d'avoir entendu Vincent Peillon évoquer l'intégration de l'éducation aux médias au socle commun de connaissances, de compétences et de culture.
ToutEduc : Que représente pour vous cette intégration ?
Christine Menzaghi : C'est une avancée forte, dont nous nous félicitons. Catherine Bizot, dont le ministre a annoncé qu'elle allait mettre en place la préfiguration d'une future direction d'administration centrale, a d'ailleurs co-signé en 2007 un rapport d'inspection générale sur l'éducation aux médias (ici) et nous avons senti, lors de sa prise de parole, qu'elle était sensible à la question du continuum éducatif, dans l'école et hors de l'école.
ToutEduc : Est-ce la seule avancée dans les annonces faites hier ?
Christian Gautellier : Non. Nous sommes aussi très intéressés par les propos de Fleur Pellerin portant sur la création au sein du Conseil national du numérique d'un groupe de travail sur la dimension éducative.
En revanche, nous avons quelques interrogations. Nous avons bien vu deux dimensions de la question, celle du numérique comme outil, qu'il s'agisse des matériels ou des ressources, et celle de l'éducation au numérique, mais la question pédagogique n'a pas été abordée. Or, pour nous, le pédagogique s'inscrit dans la logique de la refondation. Il permet de requestionner l'organisation "une heure - une classe - un enseignant", et d'aller vers des pédagogies coopératives, des espaces collaboratifs.
ToutEduc : Cette dimension n'apparaît pas explicitement dans le projet de loi d'orientation...
Christian Gautellier : Non. Mais la notion de "parcours" y est mentionnée. Et on ne peut pas mettre en place un parcours sans disposer de plages de temps importantes, au moins une demi-journée, voire une journée entière.
Christine Menzaghi : Un parcours ne s'arrête d'ailleurs pas aux portes de l'école. L'éducation aux médias ne doit pas non plus se limiter aux médias d'information, mais concerner aussi l'éducation à la citoyenneté numérique, au droit de l'internet, et s'intéresser à tous les médias, de la "télé-réalité" aux réseaux sociaux, en examinant les valeurs mises en jeu. Les acteurs de la société civile, Enjeux e-medias et toutes les associations complémentaires de l'école publique qui oeuvrent sur ces terrains ont un rôle à jouer, pour inscrire cette éducation dans un projet global, et surtout ne pas limiter l'éducation au numérique hors école à une mise en garde contre les dangers de l'Internet !
Christian Gautellier : Et c'est là que nous sommes davantage gênés. Nous constatons par exemple que ni la ministre de la Culture, ni celle de la Famille n'étaient là, pas plus que la ministre en charge des associations. Or les contenus numériques les concernent directement, même si, pour la première, il faut sans doute attendre de voir ce qui sera retenu du "rapport Lescure". Cette dimension globale du numérique, qui fait tomber les murs et qui suppose des connexions, est-elle vraiment prise en compte ? Quel rôle serons-nous appelés à jouer ? Mais surtout, qui pilotera la cohérence de ce numérique éducatif.
Sur Enjeux e-medias, lire notamment ToutEduc ici. Sur le point d'étape, ici.